Avec l’accord de Thirza Hendriks, j’ai traduit une page de son site LA CEINTURE THORACIQUE EXPLIQUÉE (thirzahendriks.com) une de mes sources en biomécanique grâce a son travail de dissection et les conclusions qu’elle tire pour donner des conseils pour un entrainement le plus sain physiologiquement parlant pour le cheval.
Bonne lecture!:

La ceinture thoracique est un de mes sujets préféré. C’est un appareil fascinant et génial qui est essentiel pour le contrôle de l’équilibre chez le cheval. Malheureusement, il est souvent négligé et faible chez de nombreux chevaux. Dans cet article, j’aimerais expliquer ce qu’est la ceinture thoracique ainsi que pourquoi elle est souvent sous-développée ou compromise et comment vous pouvez (ré)optimiser sa fonction!

Contrairement aux humains, les chevaux n’ont pas de clavicule reliant les membres antérieurs au tronc. Au lieu de cela, le cheval s’appuie sur des muscles forts qui agissent comme des « sangles» pour suspendre la cage thoracique entre les membres antérieurs du cheval – d’où son nom: sangles thoraciques. (trad : en français, il est commun d’appeler ce groupe musculaire la ceinture thoracique ou ceinture scapulaire)

La ceinture thoracique du cheval est principalement composée du M. Serratus Ventralis, aidé par le groupe pectoral. Le M. Serratus Ventralis a à la fois une partie cervicale et thoracique. Le Serratus Ventralis Cervicis est beaucoup plus épais que son homologue thoracique. Il étend le cou du cheval et tire la partie supérieure de l’omoplate vers l’avant. Il peut devenir hypertrophié ou plus prononcé en cas de traumatisme du membre inférieur, lorsque l’extension du membre avant est détournée vers les muscles du tronc.

Le Serratus Ventralis Thoracis s’insère de l’intérieur de l’omoplate du cheval à la cage thoracique et peut être intimement lié à l’oblique externe. En raison de cette connexion, le SVT peut également agir comme un muscle d’inspiration forcée.

Les deux muscles (SVT & SVC) forment ensemble un support élastique qui suspend le tronc aux omoplates. Lors de la contraction unilatérale, le poids est déplacé vers le membre du côté de la contraction musculaire – ce qui influence l’équilibre latéral du cheval. Lorsqu’ils se contractent bilatéralement, ils tirent le haut de l’omoplate vers l’avant et ainsi soulèvent le thorax du cheval – ce qui influence l’équilibre horizontal du cheval.

Indirectement, les deux muscles serratus sont également très importants pour le bon fonctionnement de l’appareil de soutien passif du cheval, car ils aident à maintenir le cheval debout lorsque les muscles sont détendus.

Pour la fonction complète de la ceinture thoracique, le Serratus est assisté par le groupe pectoral. Les pectoraux profonds crâniens (dans certains textes également appelés « subclavius ». Cependant, je considère ce nom comme un peu impropre car le cheval n’a pas de clavicule) entraine le membre vers l’avant et le tire vers l’arrière. Lorsque le membre est au sol, ils amènent le tronc vers l’avant. Les pectoraux superficiels – parfois aussi appelés pectoraux ascendants – se trouvent de chaque côté du sternum et ils avancent le membre avant et pour l’adduction. Ces muscles sont lisses, car ils stockent le glycogène. Cependant, ils présentent souvent du tissu cicatriciel et, par conséquent, la palpation est importante.

Les pectoraux transversaux sont responsables des mouvements latéraux des antérieurs. En raison de leur emplacement, ils peuvent être influencés par la sangle dans leur portion caudale. Ils sont souvent aussi assez asymétriques lors de la dissection.

Et enfin, les pectoraux postérieurs – parfois aussi appelés « profonds, ascendants ou descendants » – sont situés sous la sangle et peuvent être assez tendus chez les chevaux qui sont sensibles au sanglage.

Ensemble, tous ces muscles composent la ceinture thoracique du cheval. Lorsque ces sangles entre le thorax et les anterieurs fonctionnent correctement, la cage thoracique du cheval est soulevée et le cheval peut se déplacer dans un bon équilibre latéral et horizontal. A contrario, quand la ceinture thoracique ne fonctionne pas correctement, le cheval est déséquilibré horizontalement et sera sur les épaules.

Pour avoir une bonne posture et une bonne biomécanique, il est donc extrêmement important que les muscles de la ceinture thoracique soient bien développés. Malheureusement, de nombreux chevaux semblent avoir des muscles de la ceinture thoracique faibles ou restreints dans une certaine mesure. Alors, comment faire?

Tout d’abord, jetons un coup d’œil à la gestion générale. Les chevaux sont faits pour un mouvement dynamique. Lorsqu’on observe des chevaux primitifs dans la nature, ils paissent environ 80% du temps, mais ils passent également environ 20% du temps dans les buissons et les arbres. Cette variation des positions de mouvement et d’alimentation entretient une posture équilibrée et saine. Particulièrement pendant la recherche de nourriture entre les arbustes, le cheval utilisera ses muscles de la ceinture thoracique afin d’attraper des feuilles ou des baies juteuses.

En observant les chevaux domestiques, ils passent souvent beaucoup de temps immobiles dans les écuries. Cela met beaucoup de pression sur leur appareil de soutien qui n’a pas été conçu pour de si longues périodes d’immobilité. En conséquence, le cheval commencera souvent à mettre du poids sur son avant main.

De plus, les chevaux domestiqués n’ont souvent plus à chercher leur nourriture à diverses hauteurs. Ils sont nourris, principalement au sol. En manquant de variation dans les positions d’alimentation, leurs muscles de la ceinture thoracique se développent naturellement moins.

En tant que tel, offrir à un cheval le choix (pas de le forcer!) de diverses positions d’alimentation créera naturellement un meilleure stimulation, donc un meilleur tonus des muscles de la ceinture thoracique et une position plus en équilibre et en autoposture. Ce type de prise en charge est appelé physio passif® et est essentiel pour développer une ceinture thoracique saine parce que« là où le cheval passe la plupart de son temps, c’est là que nous pouvons obtenir le plus d’avantages. » – Jessica Krul

Même cheval, différentes positions d’alimentation. Regardez les changements de posture.

Deuxièmement, un mauvais développement ou un dysfonctionnement des muscles de la ceinture thoracique peut également survenir en raison d’un traumatisme. De nombreux chevaux ont des tissus cicatriciels au niveau des pectoraux. Cette zone est sujette à diverses blessures car à hauteur des clôtures et des portes.

Même cheval. La photo de gauche sur le cheval en vie. Image de droite pendant sa dissection

De plus, certaines disciplines prédisposent également davantage le cheval aux blessures dans cette zone en raison de la demande athlétique imposée au cheval.

Troisièmement, l’élevage joue également un rôle majeur. Malheureusement, les chevaux sont souvent élevés pour la mode plutôt que pour la fonction. Ils sont élevés pour une action excessive des membres antérieurs et une mobilité de l’encolure qui interfère avec la capacité naturelle du cheval à s’équilibrer. La reproduction de certaines lignées conduit à une mauvaise conformation avec beaucoup d’asymétries structurelles – telles que la malformation vertébrale congénitale équine.

Les déséquilibres anatomiques affectent également la biomécanique du cheval. Par exemple, de nombreux chevaux modernes montrent un placement avancé diagonal négatif au trot, ce qui signifie que le membre antérieur est toujours au sol alors que le membre postérieur diagonal a déjà quitté le sol.

Quatrièmement, le matériel peut avoir un impact sur le fonctionnement de la ceinture thoracique du cheval. Comme mentionné précédemment, les pectoraux postérieurs et transversaux sont affectés par la sangle. Il est important que la sangle ait une bonne longueur, soit placée au bon endroit et ne soit pas trop serrée.

Pendant les dissections, je recherche les effets de différentes sangles et leurs positions.

Enfin, l’entraînement joue un rôle majeur dans le (sous-)développement des muscles de la ceinture thoracique. Dans la plupart des méthodes d’entraînement, l’accent est mis sur des concepts tels que « engager les membres postérieurs », « monter le dos du cheval », « activer les muscles du tronc » et « contrôler la position de la tête et du cou ». Cependant, on parle peu de l’importance de la ceinture thoracique.

Lorsque l’on regarde la conception anatomique du cheval, les membres postérieurs sont conçus pour produire des forces horizontales qui génèrent le mouvement vers l’avant. Les membres antérieurs, pour leur part, sont principalement conçus pour gérer l’équilibre latéral du tronc contre la gravité et donc le contrôle de l’équilibre. C’est pourquoi la ceinture thoracique est si cruciale pour assurer une bonne posture et une bonne biomécanique. En termes simples, la ceinture thoracique est inextricablement liée au contrôle de l’équilibre chez le cheval.

Les chevaux ne sont pas naturellement conçus pour être montés.

Chez le jeune cheval non entrainé, le poids du cavalier et de la selle vont exercer une force importante sur son dos, le cheval creusera son dos et ce surplus de poids va le déséquilibrer sur les épaules. Sachant cela, il est de notre devoir de bien préparer le cheval à supporter cette contrainte afin de minimiser cette réaction naturelle. Nous pouvons le faire grâce à un travail postural dans lequel nous développons chez le cheval le contrôle de ce nouvel équilibre par le développement ciblé des muscles de la ceinture thoracique. Malheureusement, cette phase est souvent omise et donc le cheval est débourré sans être préparé musculairement grâce au travail en main. L’ avant main descend entre les épaules à cause du poids du cavalier qui contraint la ceinture thoracique et la capacité de lutter contre la gravité pour se maintenir en équilibre. Les antérieurs restent au sol trop loin derrière l’épaule et créent des contraintes importantes sur les articulations, en particulier le coude.

Même cheval. En déséquilibre longitudinal (cheval sur les épaules) avec placement diagonal négatif clair sur la diagonale anterieur droit (encore au sol) /postérieur gauche (déjà en l’air). Lors de la dissection, l’articulation du coude a montré des lésions sévères.

Quand le cheval est fortement sur les épaules, les postérieurs n’ont tout simplement plus de place pour s’avancer. Ils vont forger les antérieurs. Ce qui est douloureux! Donc il va raccourcir l’engagement des postérieurs ce qui va augmenter l’extension pelvienne (bassin qui s’horizontalise) car la capacité de flexion de l’articulation lombo-sacrée sera restreinte. En raison de la connexion du Serratus Ventralis Thoracis à l’oblique externe, le core (un mot qui n’a pas de traduction française mais qui signifie tonus postural du tronc) du cheval qui limite l’extension du dos (afin d’eviter de creuser le dos, pour eviter le kissing spine à terme), est également compromis. La respiration est également perturbée et la fréquence cardiaque pourrait également être affectée. Le cheval peut afficher un comportement nerveux et tendu. Il sera lourd dans les rênes et le cavalier s’y accroche généralement fermement sinon le cheval s’effondre.

‎ Le membre postérieur droit est bloqué par le décollage tardif du membre anterieur droit. Il y a un DAP négatif car l’antérieur droit est toujours au sol alors que le postérieur gauche est déjà hors sol. ‎

‎En termes simples, lorsque le cheval est sur les épaules, la ceinture thoracique est fortement mise sous tension. Si elle n’est pas suffisamment développée, elle ne peut pas redresser l’avant main du cheval. Les postérieurs ne peuvent tout simplement plus s’engager vers l’avant jusqu’à la ligne médiane. Le problème est généralement aggravé par de longues positions basses et trop fléchies de la tête et de l’encolure, ainsi que par des aides qui créent plus d’«impulsion » mais qui poussent souvent littéralement l’avant main du cheval dans le sol. Ces pratiques découlent de la théorie des « bow and string » et devraient être écartées. Une ceinture thoracique faible créera une cascade de dysfonctionnements dans tout le corps lorsque le cheval sera privé de la capacité de gérer son équilibre latéral contre la gravité et donc de contrôler l’équilibre global. Sa stabilité générale en souffrira et le mouvement deviendra lourd au lieu d’être léger et efficace. ‎

‎Ce n’est que par le développement de la ceinture thoracique que le cheval peut soulever et libérer son thorax, soutenir la base de l’encolure, créer une bonne stabilité du tronc et un bon alignement de la colonne vertébrale et permettre aux postérieurs de s’engager. Ce n’est qu’alors que le dos du cheval pourra transporter un cavalier en stabilité avec un minimum d’effort et un maximum de coordination et d’équilibre. ‎

Même cheval. D’un dysfonctionnement à un développement parfait de la ceinture thoracique

Afin de (ré)entraîner les muscles de la ceinture thoracique, l’entraînement doit être envisagé d’un point de vue neuromusculaire. Le Serratus Ventralis est innervé par les 5e à 8e nerfs cervicaux et le long nerf thoracique. Les pectoraux sont innervés par le plexus brachial ou les nerfs qui se ramifient à partir du plexus brachial.

À travers ces nerfs, le cerveau envoie un signal aux muscles chaque fois que leur mouvement est nécessaire. En tant que tel, nous devons établir ou redéfinir de nouvelles voies neuromusculaires pour libérer le potentiel du cheval pour un contrôle optimal de l’équilibre.

Une fois correctement établies, les voies resteront pour toujours dans le subconscient du cheval. Comme le pianiste dont les mains peuvent jouer la pièce la plus compliquée, sans effort, conscient, parce que le corps s’est « souvenu » des actions en la stockant dans le subconscient.

L’établissement ou la réactivation des voies neuromusculaires nécessite une approche très délicate et raffinée car il s’agit essentiellement de travailler avec le cerveau du cheval. Il s’agit de petits mouvements raffinés avec un effort conscient et une respiration libre. Si vous prenez le temps de faire ce travail, vous serez étonné par le potentiel de votre cheval.

Si cet article a suscité votre intérêt et que vous souhaitez en savoir plus sur la façon d’optimiser la ceinture thoracique de votre cheval, nous aimerions vous référer au programme de soutien en ligne.